Alors que l'ordonnance de renvoi de l'affaire du covoiturage est signée auprès des assises du Val de Marne, alors qu'un meurtre vient d'être perpétré dans un hôtel de la rue Gossec dans 12e arrondissement de Paris, la commissaire Clémence Malvoisin est convoquée chez Le Pavec, le Préfet de Police, pour une enquête très particulière.

jm Palach Mandelieu

Dans le bureau du fonctionnaire, elle est mise en présence du délégué du festival de Cannes, festival qui doit débuter dans quelques jours. Or Cyprien-Louis de Villetaneuse est franchement embêté. Depuis 2003, une accident se produit invariablement tous les ans, accident sérieux entraînant mort d'homme ou de femme. Et il aimerait bien que cette soixante-septième édition ne soit pas une nouvelle fois endeuillée.

Villetaneuse a monté un dossier à l'intention de Clémence et il s'avère que toutes les victimes ont un lien, plus ou moins proche avec Claude Bergerac, le célèbre producteur possédant à son actif bon nombre de succès. Or cette année 2014 devrait être l'apothéose de Bergerac car l'homme a du nez. Il vient de signer en tant que producteur, réalisateur et acteur un film synthèse entre Beaumarchais et Jacques Demy, Le Barbier de Cherbourg.

Clémence doit donc se rendre à Cannes, munie d'une nouvelle identité et prendre rang dans l'équipe de Bergerac, comme scénariste d'un prochain film. Bien entendu seuls le Préfet, l'adjoint de Clémence, le délégué général et Bergerac seront au courant de cette mystification destinée à cacher le véritable but, découvrir le coupable des ces attentats déguisés. Elle en fait part à son mari qui, jaloux, n'apprécie pas cette escapade cinématographique. Et, coïncidence bienvenue, son fils est en stage dans une boite de production cinématographique et va pouvoir lui donner moult informations sur ce domaine et ce petit monde fermé dont elle ne connait que quelques grandes lignes, ce qui lui permettra de tenir son rôle avec justesse. De même elle se voit coiffer par une spécialiste et monter une garde-robe par une couturière ayant habillé toutes les grandes actrices.

2003, l'année du premier accident, est également synonyme de fracture dans la vie familiale de Bergerac. Lionel, l'un de ses fils, promis à un brillant avenir d'écrivain, a disparu, et depuis n'a jamais redonné de ses nouvelles. Il est considéré par tous comme mort. Clémence s'intègre rapidement dans la petite équipe, où elle est acceptée par tous pour son charisme. Seul Sacha, l'autre fils de Bergerac qui n'est pas issu de la cuisse de Jupiter pais plutôt d'Eole tant il brasse du vent, fait tâche parmi tous ces professionnels du cinéma, quelle que soit leur fonction. Sans oublier Tseng-Nio, le chauffeur garde du corps, ou Brigitte, la vieille vendeuse de roses.

Pendant que Clémence peaufine son rôle puis qu'elle se rend à Cannes, que se passe-t-il à la Section Est de la police judiciaire ? Langlade son adjoint supervise les enquêtes en cours, particulièrement celle menée par le jeune Florent Bragatour chargé de démêler l'affaire de l'hôtel Gossec et découvrir le meurtrier de ce client de passage. Quant à Maurice, le planton, il continue de lire les œuvres de Roger-Paul Jean, le juge chargé d'instruire le procès de l'affaire de covoiturage. D'ailleurs il a prêté un des romans à Clémence et les autres suivront le même chemin. Car ces romans sont excellents, vivants, précis, humanistes, ce qui étonne un peu tout le monde, Roger-Paul Jean étant connu pour son rigorisme et son côté solitaire.

Lors de son séjour Clémence va faire la connaissance d'un acteur, haut en couleurs, bourru, grossier, vulgaire et pourtant attachant, Gérard Mordarieu, lequel circule en scooter. Elle va aussi se trouver sous le charme de Willem Dafoe, en tout bien tout honneur, malgré les appréhensions de son mari. Seulement elle échappe à un attentat, grâce à Mordarieu, et d'autres tentatives vont ponctuer son séjour.

 

Trois enquêtes, pour le prix d'une, qui vont se compléter, comme le faisait Ed McBain dans ses romans consacrés à la saga du 87e district. Car ce n'est pas parce que Clémence est à Cannes en mission semi-officielle, que la vie s'arrête. Il faut bien continuer à débrouiller les affaires en cours.

Un roman admirablement bien construit et qui ne manque pas de clins d'œil. Par exemple Clémence se rend chez la couturière, Mimi Boutillier, qui habite la même adresse que les éditions Viviane Hamy. Un appel déguisé ?

De même les romans écrits par Roger-Paul Jean portent les mêmes titres que ceux déjà consacrés à Clémence Malvoisin, se qui permet à l'auteur d'en écrire tout le bien qu'il en pense. C'est de bonne guerre.

Un roman vif, alerte, bien troussé, mais le personnage de Clémence Malvoisin, la meilleure flic de France, aurait mérité un traitement moins laudateur. Elle est belle, ce n'est pas un reproche, elle éclipse tout le monde et joue son rôle à la perfection malgré son ignorance du monde cinématographique. C'est presque trop beau pour être vrai. Et puis elle possède une qualité que je lui envie : elle a une capacité de lecture que j'aimerai bien avoir. Elle dévore le roman de trois-cents pages de Roger-Paul Jean en quatre heures. Ah si je pouvais en faire autant !

Et si l'enquête cannoise de Clémence est intéressante, celle de Florent Bragatour à l'hôtel Gossec l'est tout autant, sinon plus.