Originaire de Bretagne, Adrien Magadur est un quadragénaire parisien. Ancien policier, il est employé par l’agence de détectives Demorsy. Il a pour partenaires la rousse Alice Sommeville et Franck Vermois, un geek maîtrisant les arcanes informatiques. Adrien reste en contact avec un ex-collègue du 36, Sofien Yabrir, Kabyle d’origine. Chevauchant sa Ducati, Adrien a hérité de son père une belle stature, et peut-être une certaine instabilité. Orphelin tôt, il fréquenta jadis Enora Kerneur et sa famille dans le Morbihan, quand il était adolescent. Aujourd’hui, la jeune femme possède une galerie d’art dans le Marais, rue des Coutures-Saint-Gervais. Enora est divorcée d’un riche Iranien, architecte international, ce qui lui procure une aisance financière. Elle a besoin des services de l’agence Demorsy.

Son amie Audrey Becker, native de Strasbourg, a disparu. Certes, c’est une jeune femme pleine d’entrain, célibataire aimant la fête et multipliant les rencontres masculines. Mais il n’est pas exclu qu’elle ait eu un gros problème avec un homme de passage, par exemple. Car Audrey était inscrite, et très active, sur un site internet dédié aux relations intimes. Franck Vermois ne tarde pas à repérer un pseudo, Vaslav, dont Audrey a été une des très nombreuses amies via ce site. Celui-là sécurise exagérément ses connections. Vermois crée un profil pour Sofien Yabrir, afin de l’associer à l’enquête des détectives. Grâce au témoignage d’Angelica, croqueuse d’hommes habituée du site, ils ont confirmation que ce Vaslav utilise très régulièrement la ligne 7 du métro. Une surveillance s’impose donc.

Alexis est infirmier en dermatologie à l’hôpital Saint-Louis. En privé, il développe surtout une passion artistique. S’il utilise les murs urbains comme support, Alexis n’est pas un graffeur ordinaire. Dans son atelier, il utilise la peau comme base de son œuvre. La peau de femmes, qu’il sait dépecer avec habileté. Pour le reste des corps, ses poissons voraces s’en chargent. L’anonymat des sites de rencontres par internet lui permet de choisir ses victimes. Il est possible qu’Audrey, la disparue, en fasse partie. Le résultat exposé sur les murs est signé ArtSeine. Le hasard conduit un jour Alexis à un vernissage, à la galerie d’Enora. C’est là qu’il fait la connaissance de Marie, seize ans, la fille d’Alice Sommeville.

La jeune fille est également très douée pour le street art. D’emblée, Alexis est fasciné par Marie. Plus tard, il s’arrange pour la recontacter, et ils sympathisent bientôt. Pendant ce temps, Adrien Magadur et son équipe poursuivent leurs recherches. Piéger le coupable en pistant la prostituée Roxane n’est pas si évident. Faudra-t-il aller jusqu’à New York, pour cerner l’énigmatique Vaslav ? Tandis que Marie court un vrai danger, n’est-ce pas plutôt entre le Kremlin-Bicêtre et la rue Bobillot qu’Adrien devrait traquer le coupable ?…

Luce Marmion : Le Mur dans la peau (Éd.Pavillon Noir, 2017)

Bien que les investigations des privés dussent rester ignorées par toute personne étrangère à l’agence hormis la police, au cas où celle-ci priait Demorsy de lui transmettre ses données, Magadur prit la décision d’informer Roxane des soupçons que nourrissait l’équipe à l’égard de ce Vaslav. Elle éclata de rire, se leva et entrouvrit les rideaux. Déjà jour.
— Tu te plantes, Adrien. Ce garçon est doux comme du miel. Un ange tombé du ciel, j’insiste. Sa présence sur Lovenko n’est justifiée que par sa grande timidité. Je connais les hommes, tu peux me croire. Les prédateurs, je les flaire tout de suite. Vaslav est inoffensif. Un agneau. Si tu le rencontrais, tu ne douterais pas de lui une seconde.

Écrire et dessiner sur les murs, pourquoi pas s’il est question d’embellir l’espace urbain, et non de le saloper. Quand les artistes pratiquant le street art s’avèrent inventifs, ça donne d’assez sympathiques résultats. Grandes fresques, marquages symboliques parfois teintés d’humour, ne soyons pas rabat-joie puisque c’est créatif. Par contre, nous avons ici un personnage utilisant un "matériau" un peu trop spécial. Ce n’est rien dévoiler de préciser cet élément, puisque nous suivons en parallèle les travaux d’Alexis, tandis qu’avancent les investigations menées par des détectives privés.

Héros d’un précédent titre, “Le vol de Lucrèce”, Adrien Magadur s’inscrit dans la tradition des enquêteurs à l’existence chaotique. On suppose un lourd passif personnel et professionnel, et une vie peu saine sous l’œil réprobateur de sa collègue Alice. Ce qui ne nuit pas forcément à son efficacité. Une affaire criminelle qui permet de s’initier à une expression artistique qui s’est beaucoup développée, avec le meilleur et le moins bon. Un polar de bon aloi, qui se lit très agréablement.